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Télétravail préconisé par le médecin du travail : le refus d’accès au domicile ne peut pas justifier un refus de l’employeur

La Cour de cassation vient de rendre une décision importante en matière de télétravail et d’obligation de sécurité de l’employeur. Dans cet arrêt du 13 novembre 2025, elle affirme que l’employeur ne peut pas refuser la mise en place du télétravail recommandé par le médecin du travail au seul motif que le salarié refuse l’accès à son domicile.

Un arrêt qui clarifie la relation entre obligation de sécurité et respect de la vie privée, et qui renforce la portée des préconisations du médecin du travail.


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Contexte : télétravail recommandé et visite du domicile refusée

Une salariée d’une CARSAT se voit proposer plusieurs aménagements de poste par le médecin du travail. En dernier recours, celui-ci préconise la mise en place du télétravail deux jours par semaine, afin de permettre à l’intéressée de reprendre son activité dans des conditions compatibles avec son état de santé.

L'employeur demande alors à accéder au domicile de la salariée pour vérifier que les conditions de sécurité sont réunies. Bien que l’entreprise ait déjà produit un diagnostic de conformité réalisé par un prestataire extérieur, elle conditionne néanmoins la mise en place du télétravail à cette visite.

La salariée refuse, invoquant son droit au respect de la vie privée et du domicile. L’employeur décide donc de ne pas mettre en place le télétravail.

Elle saisit alors la justice, reprochant à son employeur un manquement à son obligation de sécurité.


La Cour de cassation : le droit au respect du domicile prime

Pour la Cour de cassation, la réponse est claire : Le salarié est en droit de refuser l’accès à son domicile. Ce refus découle d’un ensemble de textes fondamentaux, notamment :

  • l’article 2 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen (1789),

  • l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme,

  • l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE,

  • l’article 9 du Code civil.


Le domicile relève de la vie privée. L’employeur ne peut donc pas imposer une visite préalable.


Conséquence : l’employeur ne peut pas se retrancher derrière ce refus

La Cour rappelle que l’employeur est tenu :

  • de prendre en compte les préconisations du médecin du travail,

  • et, en cas de refus de les appliquer, d’en expliquer les motifs au salarié et au médecin (C. trav., art. L. 4624-3 et L. 4624-6).


Ainsi, l’employeur manque à son obligation de sécurité lorsqu’il refuse de mettre en œuvre le télétravail recommandé au seul motif d’un refus d’accès au domicile.

La cour d’appel, qui avait débouté la salariée, est donc censurée.


Un rappel important : les préconisations du médecin du travail s’imposent

Cet arrêt s’inscrit dans une jurisprudence constante :

  • Ne pas suivre les préconisations du médecin du travail constitue un manquement à l’obligation de sécurité (Cass. soc., 2 mars 2016).

  • L’employeur doit mettre en place un poste en télétravail lorsqu’il est recommandé dans le cadre d’un reclassement, même si l’entreprise ne pratique pas le télétravail (Cass. soc., 29 sept. 2023).

  • Sauf contestation dans les délais, l’avis du médecin s’impose aux parties (Cass. soc., 2022 et 2023).


Une seule exception : contester l’avis du médecin du travail

La Cour de cassation précise toutefois que l’employeur peut ne pas exécuter immédiatement les préconisations s’il engage le recours prévu par le Code du travail (art. L. 4624-7).


Ce recours doit être introduit dans les 15 jours devant le conseil de prud’hommes, selon la procédure accélérée au fond.

En l’absence de contestation, l’avis du médecin du travail s’impose.


À retenir

  • Le salarié peut refuser l’accès à son domicile sans que cela puisse lui être reproché.

  • L’employeur doit appliquer les préconisations du médecin du travail, y compris en matière de télétravail.

  • Le refus de télétravail fondé uniquement sur la non-visite du domicile constitue un manquement à l’obligation de sécurité.

  • Seul un recours formel contre l’avis médical peut légalement suspendre sa mise en œuvre.


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