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Perte des congés payés reportés : la Cour de cassation rappelle les obligations de l’employeur

La Cour de cassation a récemment rendu une décision importante sur le sort des congés payés reportés lorsqu’un salarié est en arrêt maladie pendant la période de report. Cette décision précise que les congés payés ne peuvent pas disparaître automatiquement si le salarié n’a pas eu la possibilité de les prendre. Une clarification essentielle pour les employeurs et les salariés.



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Le contexte légal : comment fonctionnent les congés reportés

En France, le droit aux congés payés est protégé par le Code du travail. Lorsqu’un salarié n’a pas pu prendre ses congés pendant l’année de référence pour cause de maladie ou d’incapacité de travail, il bénéficie d’une période de report de 15 mois (ou plus si un accord collectif le prévoit) pour pouvoir les utiliser. À l’issue de cette période, les congés non pris peuvent normalement être perdus (Articles L. 3141-19-1 et L. 3141-21-1 du Code du travail).

Mais cette perte n’est possible que si l’employeur a effectivement mis le salarié en mesure de prendre ses congés. Autrement dit, si le salarié n’a pas pu utiliser ses congés pour des raisons indépendantes de sa volonté – comme un arrêt maladie – ces droits sont protégés.


L’affaire examinée par la Cour de cassation

L’affaire qui a conduit à cette décision concernait un salarié de la SNCF. Il était en arrêt maladie du 3 mai 2017 au 3 mars 2019. Après sa reprise du travail, il a de nouveau été arrêté le 5 mars 2020, alors qu’il devait prendre 13 jours de congés payés acquis en 2018 et reportés pour être utilisés avant le 31 mars 2020.


La SNCF a alors supprimé ces 13 jours de congés non pris au terme de la période de report, estimant que le délai était expiré. Le salarié a saisi le conseil de prud’hommes, estimant avoir subi une perte injustifiée de ses droits.


La décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation a confirmé la décision des juges du fond : les 13 jours de congés reportés ne pouvaient pas être perdus.

Le raisonnement repose sur la jurisprudence européenne et française :

  1. La perte des congés payés est conditionnelle : le salarié ne peut être privé de ses congés que s’il a été mis en mesure de les prendre (CJUE, 22 sept. 2022, aff. 518/20 et 727/20).

  2. Les salariés en incapacité de travail sont protégés : si un salarié est en arrêt maladie pendant la période de report, il ne peut pas perdre ses droits (CJUE, 29 nov. 2017, aff. 214/16).

  3. Cas des salariés reprenant le travail avant un nouvel arrêt : lorsque le salarié a travaillé au début de la période concernée, mais qu’un arrêt maladie survient avant qu’il ne puisse prendre ses congés, l’employeur doit démontrer qu’il a mis le salarié en mesure de les prendre pour pouvoir invoquer leur perte.


Dans cette affaire, la SNCF n’a pas pu prouver avoir accompli ces démarches. Par conséquent, les congés reportés ont été conservés et restitués au salarié.


Les enseignements pour les salariés et les employeurs

Cette décision rappelle plusieurs points importants :


  • Les droits aux congés sont protégés : un salarié ne peut pas perdre ses congés reportés s’il est dans l’incapacité de les prendre pour cause de maladie.

  • L’employeur a des obligations précises : il doit informer le salarié de ses droits, lui permettre de poser ses congés et veiller à ce qu’il puisse effectivement en bénéficier pendant la période de reprise.

  • La vigilance est nécessaire pour éviter les contentieux : la planification des congés reportés doit être organisée avec soin, en tenant compte des absences pour maladie, afin de respecter les obligations légales et éviter des litiges coûteux.


Une jurisprudence transposable à tous les salariés

Bien que l’affaire concernait un agent de la SNCF, la décision est transposable aux salariés de droit privé. Les entreprises doivent donc être attentives à leur rôle dans la gestion des congés reportés et s’assurer que chaque salarié a la possibilité effective de les prendre.


Conclusion

La Cour de cassation renforce la protection des salariés en matière de congés payés reportés. Pour les employeurs, cette décision est un rappel clair : la perte automatique des congés reportés n’est possible que si toutes les conditions légales sont respectées et que le salarié a été en mesure de les prendre. Pour les salariés, c’est une garantie supplémentaire que leurs droits aux congés ne peuvent pas être supprimés arbitrairement, même en cas de maladie prolongée.


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