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Attribution d’actions gratuites : en cas de licenciement injustifié, seul un préjudice lié à la perte de chance peut être indemnisé

Le principe d’attribution des actions gratuites


Les plans d’actions gratuites, souvent utilisés pour fidéliser les salariés et mandataires sociaux, sont mis en place par décision de l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires. Cette dernière autorise l’attribution, mais c’est l’organe dirigeant de l’entreprise (conseil d’administration, directoire, etc.) qui fixe les modalités précises : durée des périodes d’acquisition et de conservation, critères de performance, conditions d’ancienneté ou de présence. L’encadrement légal laisse ainsi une certaine liberté à l’employeur dans la définition des conditions d’attribution.


La condition de présence comme critère déterminant


Parmi les conditions souvent posées figure celle de la présence effective du bénéficiaire dans l’entreprise jusqu’à la fin de la période d’acquisition. Si aucune précision n’est apportée, le salarié conserve normalement ses droits aux actions, même en cas de départ. En revanche, lorsque le plan précise que la présence est obligatoire jusqu’à un certain terme, la rupture du contrat de travail avant cette date entraîne la perte du bénéfice des actions non encore acquises, et ce, quelle que soit la cause de la rupture.


Un licenciement injustifié ne suffit pas à remettre en cause la clause


La Cour de cassation a rappelé cette règle dans un arrêt du 26 février 2025. Elle y précise qu’un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse avant la fin de la période d’acquisition ne peut pas revendiquer l’attribution des actions. Autrement dit, même en cas de rupture abusive, le non-respect de la condition de présence fait obstacle à l’acquisition des titres. Le salarié ne peut donc ni obtenir les actions, ni se prévaloir de la qualité d’actionnaire.


Une indemnisation possible uniquement pour la perte de chance


En revanche, si la rupture du contrat a empêché le salarié de remplir les conditions prévues, une réparation peut être envisagée, mais uniquement sous forme d’une indemnisation pour perte de chance. Cette approche vise à compenser la probabilité qu’aurait eue le salarié d’obtenir les actions si la relation contractuelle s’était poursuivie jusqu’au terme de la période d’acquisition, et que les autres critères (notamment les résultats de performance) avaient été remplis.


Appréciation souveraine du montant par les juges


Le montant de cette indemnisation ne correspond pas à la valeur totale des actions non perçues. Il appartient aux juges du fond d’en apprécier le montant de manière souveraine, à partir des éléments apportés au débat par les deux parties. Les juges peuvent ainsi tenir compte de la probabilité de réalisation des conditions fixées par le plan, mais ne sont pas obligés de motiver leur décision quant aux éléments qu’ils décident d’écarter. Cette liberté d’appréciation a d’ailleurs été confirmée dans un autre arrêt du 11 septembre 2024.


Une décision cohérente avec la logique des plans d’attribution


Ce rappel de la Cour de cassation souligne l’importance, pour les entreprises, de rédiger avec précision les conditions d’attribution des actions gratuites, et notamment de prévoir explicitement la condition de présence si elle est exigée. Pour les salariés, cette décision rappelle que la rupture du contrat, même injustifiée, peut entraîner la perte de certains avantages différés. La seule voie d’indemnisation possible réside alors dans la démonstration d’une perte de chance, à évaluer au cas par cas.


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